mardi 23 octobre 2012

Ce à quoi ouvre une psychanalyse.


Un ami me confiait récemment son jugement : « pour aller en psychanalyse, il faut manquer de projet (de désir) ».

Cette opinion tranchée renvoie à la psychanalyse qui opèrerait du côté de la douleur, de la souffrance, et des manifestations psychopathologiques lourdes.

Or, le désir est à l’œuvre. Comme le désir ne se confond pas avec la satisfaction : la jouissance immédiate, il est à l’œuvre en permanence. Ce n’est pas tant le manque de désir qui ouvre à une cure ou une thérapie, mais plutôt le désir dans ce qu’il a d’insaisissable, de pulsionnel, et aussi de refoulé. De ce que ce désir qui se heurte à l’autre et donc, ça rate.

 
En étant du côté de la parole et du silence, la psychanalyse opère par le symbolique. Du symbolique pour le patient qui met des mots, analyse, fait advenir sa vision du monde, et met à jour son désir propre. Un désir sans toute puissance : un désir du possible. Car faire advenir tout son désir, ce serait entamer le désir de l’autre. On ne peut jamais réaliser la totalité de son désir, car le désir c’est l’autre. L’autre fait désir, car son désir propre a pour objet l’autre : celui ou celle que l’on veut honorer de son désir. Or, l’autre n’est pas le même, la liberté de l’un va avec la liberté de l’autre. C’est un principe de séparation irréductible.

 Donc, une psychanalyse peut opérer de différents côtés :

Pour ce que la vie compte d’épreuves qu’on appellera « réel », interpréter ces épreuves, y prendre sa part de responsabilité. Responsabilité n’est pas culpabilité, aussi prendre sa part de responsabilité est y investir de soi et pas seulement de l’autre. Que l’autre soit un conjoint, une famille, ou un grand Autre : le destin, Dieu, le hasard… Prendre sa part de responsabilité est se réapproprier.

 
Mettre à jour son désir. Qu’il parle d’amour, de travail, d’occuper sa vie et d’éprouver des affects, le désir opère à l’insu de celui (celle) qui le porte. Le désir, c’est le manque, c’est-à-dire ce dont nous sommes frustrés et qui nous fait rencontrer l’autre, aimer, créer, travailler, faire œuvre. Et aussi : rater, répéter, laisser échapper, tenir à distance. Et encore : haïr, refouler, enfouir… Et pour d’autres : asservir l’autre à leur désir, transgresser les limites, se mettre en danger, fétichiser le désir. Le désir n’est donc pas ce que l’individu croit qu’il a ou accomplit, mais la cause de ce qu’il accomplit ou a. Une cause logée dans l’inconscient « boîte noire » où s’inscrit notre vie depuis la petite enfance.

 La vision du monde. C’est ce que la sagesse populaire appelle « le verre à moitié vide, ou le verre à moitié plein » pour un même verre vu au même instant par deux ou plusieurs personnes. La vision du monde, celui qui constitue une réalité [psychique] par les perceptions, les représentations, les idéaux, la présence de l’autre et ce qu’elle suscite comme fantasmes et projections, les objets du quotidien que l’individu fait siens, auxquels il donne place et valeur, l’éducation et le cadre social transmis en ce qu’ils donnent une lecture du monde et de l’autre.

Des symptômes. La question de l’amour et du rapport au père, et de la figure patriarcale ancienne ont eu pour conséquence la « bonne vieille névrose de papa », avec culpabilité, conflit entre conformité et singularité, refoulement de la sexualité. Le glissement s’opère vers de nouveaux symptômes qui rendent compte d’une injonction de la société à performer. La peur du déclassement social, la perte d’une jouissance immédiate, du sexe dégagé de l’amour et donc des affects, l’éclatement des familles et la perte des repères de l’autorité engagent aujourd’hui de nouvelles demandes thérapeutiques et de nouvelles observations cliniques.

 
Une psychanalyse du possible. Le patient trouve en une psychanalyse une compagne qui n’encombre pas, ne discourt pas à la place de celui qui exerce sa parole ; ne juge pas, et s’autorise à marquer une limite, une séparation qui, justement, faisait défaut ; essaie d’établir les faits pour réinterpréter les affects et la scène où, la répétition ramène l’individu comme une laisse ramène l’animal à celui qui le tient.

 
Pourtant, une psychanalyse n’est pas un idéal. Les idéaux de la psychanalyse et la recherche de pureté, c’est ce que la psychanalyse véhicule de fantasmes, de fascination et de répulsion.

 
Une psychanalyse n’est pas un idéal, c’est un possible.

L’analyste laisse une place vacante : celle que le patient, ou « analysant » va occuper avec sa parole. Il n’est pas dit par avance ce que le psychanalyste fera ou ne fera pas, ce qu’il dira ou ne dira pas. Le psychanalyste écoute, ce qui peut être perçu comme du silence par l’analysant. C’est une écoute du vivant, d’Un vivant. Et la conséquence en est que l’analyste pose des questions, souligne, scande, donne des encouragements, sourie, dit bonjour, respecte, parfois quand c’est nécessaire, encadre, c’est-à-dire met un cadre quand ça vient à manquer, donne des règles du jeu si le terrain éthique est vide ou creux, bref il y va d’une relation entre deux comme entre eux deux.

 
Si le doute, les questions, la souffrance et l’épreuve peuvent être au point de départ du processus, le patient peut trouver plus tard du désir d’analyse, c’est-à-dire ce moment de l’analyse où elle a produit une transformation. Moment où la question n’est plus d’évacuer les symptômes, mais où l’intérêt pour son auto-analyse ouvre à une élucidation du monde : le sien, avec le désir mis à jour et ce que le monde autour peut en accueillir.
https://www.facebook.com/#!/pages/Marc-Lasseaux-Psychanalyste/145870105449732?fref=ts

mardi 20 mars 2012

Voies et voix de la psychanalyse


La prise en charge familiale.
Dans une famille, ce qui se passe est souvent attribué à l’Autre : un enfant qui pose problème, un parent qui s’estime fautif ou défaillant, un fonctionnement qui crée de la souffrance, du silence, ou du conflit.
La prise en charge familiale est un travail de groupe. Chacun y est légitime à établir sa parole.

Voies et voix de la psychanalyse.
Un évènement personnel, familial, les questions de la vie d’aujourd’hui peuvent conduire à débuter une psychanalyse.
La psychanalyse est aussi une expérience, et une façon de travailler son désir.

 
Le désir de travail.
A l’occasion d’une prise de fonction, d’une responsabilité ou au quotidien, le désir se manifeste dans le travail. Le travail ne fait pas seulement motivation. Il peut faire œuvre, et peut aussi faire asservissement. Le travail, avec ses ratages, son plaisir, les doutes et les questions, est une confrontation à l’Autre.